lundi 6 avril 2009

Quelques points clés en substance ...

Pour une définition du projet urbain, dans une acception élargie

On peut définir le projet urbain comme « une démarche d’initiative publique qui a pour objet de définir un cadre et une stratégie d’action en vue d’induire des dynamiques urbaines (ou un processus de mutation urbaine) en prenant en compte les logiques des agents et les jeux d’acteurs et en articulant les différents registres d’action aux différentes échelles inférant sur ses conditions de concrétisation ».

Structurer les démarches au plan organisationnel : la question du « process »

Bon nombre de déboires dans les démarches de projet urbain sont liés à l’absence d’une définition claire du processus d’élaboration, articulant les rôles respectifs des techniciens et des élus mais aussi des acteurs divers : acteurs co-producteurs ou partenaires du projet, acteurs sociaux et notamment les habitants. Or, la structuration des démarches de projet urbain passe notamment par la définition d’un cadre de référence qui puisse être partagé par les différentes catégories d’acteurs. Celui-ci doit à la fois préciser :
- la nature du contenu à établir, dans ses différentes composantes, d’une part,
- les fonctions des différents intervenants du projet, les éléments récurrents ou invariants au plan organisationnel et les points déterminants au sens de ce que pourrait être un « process-qualité », d’autre part.

Les composantes-clés d’un projet urbain et la structuration du contenu



De manière générale, si l'on se place provisoirement au-delà des acteurs, la structure du contenu d’un projet urbain se construit et s’articule de manière itérative autour de trois composantes ou pôles majeurs que sont schématiquement :
- Le programme ou contenu programmatique, qui consiste à définir le « produit urbain » ou le processus recherché, en l’inscrivant dans une stratégie à conduire dans le temps pour atteindre les objectifs exprimés
- La préfiguration du projet, dans ses différentes expressions, qui met en jeu tout le travail de conception des artefacts divers attachés aux lieux futurs et notamment la conception urbaine, à la fois en termes d’organisation fonctionnelle, de design urbain et paysager ainsi que de définition technique
- Le processus de réalisation par lequel l’ambition va pouvoir s’inscrire dans la réalité urbaine : c’est en quelque sorte ce « chemin d’accès » pour parvenir aux objectifs et au « produit urbain » visés. On peut aussi parler de faisabilité, laquelle évoluera au cours de la démarche en partant des logiques et des jeux d’acteurs pour traiter ensuite des modes de mise en œuvre et des outils opérationnels.

Il est essentiel que ces trois composantes-clés du contenu du projet urbain s’articulent entre elles à chaque phase de l’élaboration du projet, même si celles-ci mettent en jeu des champs disciplinaires et des savoir-faire spécifiques ainsi que des acteurs différents.

Adapter l’expression du contenu à la maturation de la démarche



Un des points essentiels de la démarche de conception sera de bien situer les phases de maturation de la démarche générale de projet car, de manière pragmatique, cela doit conduire à adapter en conséquence le niveau de définition du contenu et ses modes d’expression à ce qui doit être véritablement débattu et décidé. En outre, la formulation du contenu du projet devra en décliner les différentes composantes. Sur ce plan, les supports d’expression devront être aussi de même niveau de définition pour chacune des composantes (conception programmatique, urbaine et opérationnelle).

Tout ceci devra donc conduire à recourir aux supports adéquats selon le moment pour éviter les difficultés de compréhension récurrents sur le niveau d’avancement du projet que les préfigurations peuvent induire. Pour illustrer le propos, on évitera les confusions répandues consistant à mettre en avant du « dessin urbain » dans une phase préalable avant que l’approche programmatique et la faisabilité n’aient été abordées.

Le contenu-programme :

Sur ce volet, il y a lieu de faire évoluer les modes d’expression pour sortir des formulations normatives et quantitatives, en dépassant la seule description des artefacts matériels qui seront mis en œuvre en termes d’aménagement physique. Pour ce faire, on orientera son expression vers une vision dynamique mettant en avant les potentialités d’usages ou fonctionnalités des lieux, les dynamiques urbaines attendues, les changements d’image. Cette formulation du programme permettra de situer les éléments de la conception urbaine et des artefacts urbains qui auront été étudiés par ailleurs pour donner tout le sens du projet.
Celui-ci gagnera à avoir une expression « à géométrie variable » en distinguant les différents niveaux de formalisation avec le « cahier des charges d’objectifs », exprimant le « noyau dur » du projet, le programme prévisionnel, élaboré à partir des objectifs et des scénarios d’évolution, lequel sera ensuite confronté et négocié avec les acteurs partenaires du projet pour conduire au programme opérationnel, correspondant à ce qui est réellement programmé.
Par ailleurs, il apparaît pertinent d’exprimer, pour l’ensemble des acteurs du projet, un document de référence sur les choix identitaires qui puisse servir de guide ou de fil conducteur tout au long de l’élaboration et de la mise en œuvre du projet urbain. Ce « cahier des charges idenditaire » pourra ainsi permettre à la fois :
- d’instruire la démarche de conception, dans ses différents aspects et notamment celui de la conception urbaine et ses aspects connexes évoqués plus haut (style de mobilier urbain, éléments d’art urbain, toponymie,...), tout en laissant leur expression ouverte
- d’orienter la définition et la mise en œuvre des produits immobiliers, dans une certaine mesure
- de constituer le cadre d’actions d’accompagnement en termes de communication dans la phase initiale de mise en œuvre du projet pour favoriser ces processus d’ancrage culturel et s’appliquer, en amont, aux actions de promotion du projet auprès des partenaires potentiels.

La conception urbaine :

Les modes d’expression de la conception urbaine ont fait l’objet de nombreux travaux. Toutefois ceux-ci s’appliquent essentiellement à la phase de finalisation du projet urbain et restent généralement centrés sur les représentations graphiques (ou infographiques). Or, nous avons insisté sur cette nécessité d’ajuster les expressions du contenu à ce qui doit être véritablement débattu et décidé et, à ce titre, de les hiérarchiser en faisant porter les choix sur les éléments de structure du paysage urbain et non sur tout ce qui s’apparente à des choix d’architecture, lesquels risqueraient de refermer le champ des possibles sur le projet urbain.
A ce titre, dans les phases préalables, l’expression consistera plus à évoquer qu’à préfigurer une réalité projetée en s’aidant d’images de référence par exemple, notamment pour illustrer l’approche-programme dans ses traductions urbaines.
Afin de bien mettre en avant ce qui doit être acté même dans la phase de finalisation, il est nécessaire de sortir du plan masse comme mode d’expression centrale du projet urbain au profit d’autres modes exprimant ce caractère de « projet-cadre » dans lequel s’inscriront différents projets particuliers échelonnés dans le temps. C’est ce qui permettra de le positionner dans la durée.
Ainsi, la conception urbaine pourra s’appuyer sur un travail de définition exprimant notamment :
- les principes de composition urbaine qui établiront les lignes de structuration du site, avec différents modes d’expression (définition des alignements bâtis majeurs délimitant les espaces publics ou bien principes d’ordonnancement, à travers par exemple des axes d’implantation des éléments bâtis, des tracés régulateurs et par ailleurs des espaces non aedificandi)
- plus largement, la définition des éléments constitutifs du paysage urbain (densité, volumétrie, rapport des pleins et des vides, place du végétal, scénographie des espaces urbains, etc.)
- la déclinaison des éléments porteurs d’identité avec la recherche de style ou de vocabulaire appliquée notamment aux espaces publics (ainsi qu’à des éléments d’architecture, le cas échéant), en rapport avec les choix identitaires.

La faisabilité :

La faisabilité (ou processus de réalisation) ne sera pas exprimée en tant que telle mais sera rapportée à l’approche programmatique et à la conception urbaine pour asseoir les éléments de projet avancés dans un processus itératif. Il y aura différentes phases où l’on passera des premiers tests sur la faisabilité des concepts de projet à la construction du dispositif de mise en œuvre.
Ainsi, la première grande étape va consister à identifier les logiques objectives en présence (logiques observées, évolutions émergentes et évolutions prévisibles) et à repérer les acteurs porteurs de changement qui pourraient constituer les moteurs d’un projet urbain.
La deuxième grande étape s’attachera à confronter les concepts directeurs avec la réalité des logiques socioéconomiques (ou dynamiques urbaines) en présence et de leurs perspectives d’évolution, en testant les hypothèses de programme et en mettant en évidence les conditions de leur concrétisation. C’est aussi l’aptitude du lieu et plus largement du territoire qui sera testée avec les contraintes techniques ou réglementaires, inférant sur les potentialités d’utilisation des sols et en intégrant le fait que celui-ci peut être habité (et ce de plus en plus dans les problématiques rencontrées).
La dernière grande étape, correspondant à la phase de finalisation du contenu, s’attachera à exprimer le dispositif nécessaire à la mise en œuvre du projet précisant la stratégie opérationnelle au regard du positionnement recherché.